La master class de Laurent Lafitte
Regard croisé sur cette belle rencontre : deux étudiantes de l’école racontent…
Blandine Bonelli
Si Laurent Lafitte se décrit lors de cette rencontre comme un « ancien flemmard », son parcours et l’enseignement qu’il nous transmet se placent sous la valeur travail : « un comédien doit toujours prouver aux autres qu’il a de la valeur.
Il démarre sa carrière à 15 ans, en répondant à une annonce parue dans le journal pour un téléfilm avec Michael Lonsdale. Il ne retourne pas au lycée après ce tournage et suit une formation aux cours Florent, décroche le conservatoire en 1996 (formé par Raymond Acquaviva). Il complète sa formation en Angleterre, où il se forme à la comédie musicale. Cette formation à la danse lui permet de comprendre l’importance d’aller au bout de ses gestes dans le jeu d’acteur, et la maîtrise de l’anglais lui ouvre plusieurs opportunités.
Pendant plusieurs années, il vit de son métier de comédien en alliant le théâtre, les téléfilms et le cinéma. En 1993 il joue le rôle de Juan, personnage récurent dans la série Classe Mannequin. Cette expérience, enrichissante, est aussi vécue comme sclérosante pour l’acteur et le limite un temps dans sa volonté de travailler.
Au début des années 2000 il connaît une phase de doute et ne travaille pas pendant deux ans. Il reprend confiance en se mettant à l’écriture d’un one-man-show, et Gildas Bourdet, qui l’emploie dans Le malade imaginaire en 2003, lui redonne le goût de la scène. Laurent Lafitte explique que l’écriture de son spectacle en 2008 a été pour lui une « prise de pouvoir » dans un milieu où son physique « bon chic bon genre, ni assez moche ni assez beau », l’empêchait de se démarquer. Les personnages qu’il y incarne sont pour beaucoup nés quelques années plus tôt, lors d’écritures de sketchs pour des scènes ouvertes, que Laurent Lafitte expérimente en compagnie d’Elie Kakou et Elie et Dieudonné au Café de la Gare, les dimanche soirs. La notoriété acquise avec son one-man-show Laurent Lafitte, comme son nom l’indique, produit par Dominique Farrugia, lui ouvre plusieurs portes : propositions de rôles au cinéma, une série d’émissions avec Zabou Breitman sur France Inter et l’entrée à la Comédie Française en 2012.
Laurent Lafitte nous explique qu’il n’y a pas de trajet type pour un comédien, ce qui est déterminant c’est le moment où l’on devient cohérent dans ce que l’on fait, pour soi et pour les autres : si l’envie de faire est là, il faut aller au bout de cette envie et ne pas réfléchir ! « C’est une bataille et il faut que ça reste léger ». Le plaisir de jouer et la détente sont capitaux dans le métier d’acteur.
Autre élément capital : le réseau. Laurent Lafitte préfère le terme de famille, qu’il s’est forgée au cours de ses années de formation. Ainsi Guillaume Canet lui donne un rôle dans Les petits mouchoirs, en 2010, qui vient renforcer sa visibilité dans le cinéma français. De même Murielle Mayette, qui était sa professeure au conservatoire, lui propose d’entrer à la Comédie Française en 2012 après l’avoir vu dans son one-man-show et au théâtre dans une mise en scène de Zabou Breitman.
« Rester dans le plaisir mais ne pas attendre d’être sauvé », c’est le conseil que l’acteur choisit de nous donner pour clôturer cette rencontre, ayant compris très tôt qu’il pouvait passer à côté de projets simplement par manque de travail.
Manoulia Jeanne
« Il parle avec simplicité et avec beaucoup de recul de ce qui fait de lui un si grand acteur…
Laurent fait ses débuts au cours Florent, ou il montre très tôt On purge bébé. Il estime que le
metteur en scène a une vue aérienne et que c’est important pour un acteur de mettre en scène des comédiens afin de développer cet autre point de vue.
Un acteur ou un artiste ne peut/ne doit pas être dépendant. Au cinéma il rédige des fiches car les scènes sont souvent tournées dans le désordre, cela lui permet de ne pas perdre de vue l’évolution de son personnage.
Ses premiers conseils : « arrêter de réfléchir et de tracer ! » et « être acteur c’est une bataille mais qui doit rester dans le plaisir »
Il nous parle à cette occasion de la détente, ne pas réfléchir et resté détendu sur scène… Un acteur « bête » est un bon acteur car il réfléchit moins. Il ne faut pas se focaliser sur quelque chose et vouloir tout comprendre.
Laurent traverse une période de travail intense, il est débordé et n’a jamais autant travaillé. Et c’est ce qu’il a toujours voulu et ne sent pas encore rassasié !
Son dernier conseil
Ne jamais douter. Être sur de soi sans arrogance. Prendre une direction et ne pas la lâcher.